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lundi, 01 septembre 2008

Réparés, les crimes de la colonisation

Berlusconi payera 5 milliards d'euros en 25 ans à Kadhafi pour les crimes de la période coloniale. Mais l'économie italienne y trouve son compte.
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Après quatre décennies d'incompréhensions et de menaces réciproques, les relations entre l'Italie et la Libye semblent vouloir s'apaiser. Le premier ministre Silvio Berlusconi s'est rendu en grandes pompes à Benghazi, reçu par un colonel Kadhafi dans ses meilleurs jours, pour signer un "Traité d'amitié et de coopération" mettant définitivement fin au contentieux résultant de l'entreprise coloniale italienne dans le pays nord-africain.

De phrases ronflantes en ronds de jambes, Mouammar Kadhafi qui, par ailleurs, célébrait le 39e anniversaire du coup d'Etat l'ayant porté au pouvoir, a estimé qu'avec "ce document historique, l'Italie s'excuse pour les tueries, les destructions et la répression au détriment du peuple libyen durant l'occupation". "Au nom du peuple italien et en tant que chef du gouvernement, je me sens le devoir de manifester notre douleur pour les événements du passé", lui répondait Silvio Berlusconi. En signe de bonne volonté, le Premier ministre italien a apporté un chèque de 5 milliards d'euros (à échelonner sur 25 ans) pour la construction de logements, le paiement de pensions de guerre aux Libyens ayant combattu pour l'Italie, le financement de bourses d'étude, la réalisation d'une autoroute reliant Tripoli à la frontière tunisienne et la fourniture d'un système de radars en guise de protection de la frontière sud.

Satisfait, Mouammar Kadhafi a annoncé que les affaires pouvaient reprendre; ce qui, ajoutait Berlusconi, "signifie obtenir plus de gaz et de pétrole de la meilleure qualité et recevoir moins d'immigrés clandestins qui partent de leurs côtes".

L'histoire de la présence italienne est tragique. Rome obtient la Cyrénaïque et la Tripolitaine en 1911 et resserre son étau sous le fascisme. De massacres en déportations dans des camps de concentration, il est estimé qu'un quart de la population libyenne de l'époque fut anéantie. La triste aventure prit fin en 1943 et le pays obtint son indépendance en 1951. Restait le contentieux avec Rome. Déterminé, le colonel Khadafi devait chasser les derniers résidents italiens en 1970, confisquant leurs biens et exigeant de somptueux dommages de guerre. Rome fit la sourde oreille jusque dans les années '90. En 1986, Tripoli lança même deux missiles vers la petite île de Lampedusa en guise d'avertissement. Puis vint le phénomène de l'immigration clandestine que la Libye utilisa comme arme de chantage.

L'accord de Benghazi met fin aux tensions. Si la Libye espère le traduire en infrastructures financées par Rome, c'est surtout à la Péninsule qu'il profite. ENI, le consortium italien des hydrocarbures, importe annuellement 5 milliards d'euros en gaz et en pétrole provenant du désert libyen et vient de renouveler ses concessions pour 25 ans. Rome entend jouer un rôle économique et politique central en Méditerranée, face à la concurrence de la France, de l'Espagne, de la Corée du Sud et de la Chine. Mais sur ce point tout reste à écrire : les sautes d'humeur de Mouammar Kadhafi sont légendaires.

Frédéric Hacourt

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