mercredi, 11 février 2009
APE: négociations avec l'UE mais l'Afrique centrale "pas prête" (ONG)
LIBREVILLE, 9 février 2009 (AFP) — L'Afrique centrale "n'est pas prête" pour conclure avec l'Union européenne (UE) un accord de partenariat économique (APE), en remplacement d'un régime préférentiel expiré fin 2007, a affirmé un responsable d'ONG participant à des négociations sur ce sujet, en cours, au Gabon.
"La région Afrique centrale n'est pas prête pour signer l'APE, il y a des réformes profondes à faire" auparavant, a déclaré à l'AFP Jacob Kotcho, membre de la Plate-forme des acteurs non étatiques d'Afrique centrale (Panéac), un des participants aux négociations ouvertes le 2 février et qui s'achèvent mardi.
Des experts d'Etats, d'institutions régionales et d'ONG participent à ces discussions sur des "points de divergences" empêchant la signature de cet accord de libre échange, que de nombreux pays du bloc Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP) hésitent à parapher par crainte pour leurs économies souvent fragiles.
"Nous sommes préoccupés. Les négociations techniques patinent, nous n'avançons pas, la partie européenne n'avance pas", a indiqué M. Kotcho.
L'ouverture des marchés à la faveur d'un APE signifierait pour beaucoup "des pertes de recettes douanières" à compenser par d'autres moyens, "ces mesures d'accompagnement sont une des préoccupations majeures pour nos Etats", a-t-il dit.
En outre, la signature en janvier par l'UE et le Cameroun d'un APE "intérimaire" -le premier avec un pays d'Afrique centrale- a "porté un coup à la dynamique régionale", selon lui.
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jeudi, 05 février 2009
COMMUNIQUE DE PRESSE 04.02.09 :APE[1]: les socialistes persistent et signent en faveur du développement, face à une droite bornée et irresponsable
Majoritaire au Parlement européen, la droite s'apprête à voter en faveur d'un texte qui vise à privilégier les intérêts commerciaux de l'UE au détriment des populations des pays les plus pauvres et les plus vulnérables de la planète ! L'eurodéputé socialiste Alain Hutchinson dénonce une attitude d'autant plus scandaleuse et irresponsable que des millions de personnes subissent actuellement de plein fouet les effets cumulés des crises financière et alimentaire mondiales.
Ce jeudi à Strasbourg, une résolution sur l'impact des accords de partenariats économiques sur le développement sera soumise au vote des parlementaires européens. Après avoir refusé tous les amendements proposés par les socialistes pour tenter de rendre le texte plus conforme aux exigences de développement et de solidarité avec nos partenaires africains, des Caraïbes et du Pacifique, les parlementaires européens de droite s'apprêtent à confirmer qu'à l'instar de la commission européenne, ils attachent plus d'importance au commerce qu'au développement.
"Une fois conclus, les APE ne changeront pas notre quotidien", souligne Alain Hutchinson, mais "en l'état, ils auront des conséquences catastrophiques sur la vie de millions de gens dans les pays ACP". C'est d'ailleurs ce qui mobilise les socialistes européens qui continuent d'insister pour que les APE répondent avant tout aux intérêts et aux aspirations des pays ACP, en ce compris leurs parlements et leur société civile. Si on impose aujourd'hui aux pays ACP les règles du commerce international, on va tout droit au désastre. Il est dès lors urgent qu'un véritable dialogue prenne enfin forme entre l'UE et les pays ACP autour de la question des APE. Un dialogue qui devrait avoir lieu au sein de l'assemblée parlementaire paritaire ACP-UE.
Dans ce dossier, nous faisons face à une droite dogmatique, bornée et manifestement incapable de tirer les leçons de la crise mondiale actuelle. C'est pourquoi, avec les verts et la gauche unitaire, nous proposerons jeudi une résolution alternative qui reflètera les aspirations des populations du Sud. Dans quelques semaines, le Parlement européen sera amené à ratifier ou non les premiers projets d'accords. Et Alain Hutchinson de prévenir : "Après des mois, et pour certains des années de combat pour faire respecter les revendications des populations des pays ACP, nous n'accepterons jamais de voir le commerce triompher au détriment du développement et de la vie de millions de personnes.
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samedi, 22 mars 2008
LE SOCIOLOGUE JEAN ZIEGLER SUR LES APE : " Le Président Wade témoigne d’un grand courage et d’une grande lucidité "
(Continent Premier) - Le sociologue suisse et rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation, a dénoncé les pressions exercées par la Commission Européenne sur les pays ACP. L’auteur de « L’Empire de la Honte », Editions Fayard, disponible en poche, voit dans les APE, une autre « Organisation de la Faim » par les Maîtres du monde. Jean Ziegler espère que le « combat visionnaire du Président Wade l’emporte ». Un soutien de taille mais les Africains, vont-ils encore résister ?
Pensez-vous que les APE constituent un danger pour la sécurité alimentaire en Afrique ?
« Ecoutez, je trouve que le Président Wade témoigne d’un grand courage et d’une grande lucidité pour s’opposer fermement aux APE. La conséquence de ces accords est triple : l’accord de Cotonou qui devait durer jusqu’en 2020 a été rompu unilatéralement alors qu’il prévoyait l’asymétrie en prônant un libre accès des agriculteurs africains aux marchés du Nord et donnait la possibilité en même temps de lever des taxes sur les importations agricoles du Nord.
Si les APE passaient, ce serait catastrophique pour les ACP. Ces pays n’auraient plus le droit de lever des taxes douanières, or dans les états industriels fortement industrialisés comme la Suisse, la France, etc, les douanes jouent un rôle négligeable aujourd’hui. Mais les taxes douanières sont essentielles pour les pays du Sud. Si les pays africains n’en disposaient plus, ils s’appauvriraient encore, et d’une façon dramatique. Aux APE s’ajoute l’accord d’investissement qui prévoit un égal traitement pour un capital étranger comme pour un capital autochtone. Des multinationales comme Nestlé pourraient exiger le même traitement que n’importe quelle PME sénégalaise, or il est évident, et l’histoire l’a montré, que sans protection aucune industrie autochtone ne peut se développer. Faire entrer en compétition des entreprises sénégalaises avec la première multinationale et agro-alimentaire au monde est tout simplement impossible. C’est comme qui dirait un match de boxe entre Mike Tyson et un pauvre des faubourgs d’Abidjan. C’est de la folie ! Les règles sont les mêmes pour les deux mais la situation de départ est évidemment totalement différente. L’accord d’investissement est une autre catastrophe qui menace. J’espère beaucoup que le combat visionnaire du Président Wade l’emporte.
Il y a un mépris incroyable de la part des Européens parce que l’ UE fait du dumping agricole au Sénégal, au Mali, et partout. L’année dernière, les pays industrialisés du Nord ont payé 349 milliards de dollars de subventions à l’exportation et à la production à leurs paysans. Ce qui fait qu’au marché de Sandaga à Dakar aujourd’hui, vous pouvez acheter des légumes et des fruits portugais, français, espagnols, italiens, grecs, etc, à moitié ou au tiers du prix des produits sénégalais équivalents. Quelques kilomètres plus loin, sous un soleil brûlant, le paysan Wolof travaille avec sa femme et ses enfants jusqu’à 15 heures par jour…. Et n’a pas la moindre chance d’acquérir en échange un revenu minimum décent. Comme je l’ai souligné dans L’Empire de la honte, peu d’êtres humains sur terre travaillent autant et dans des conditions aussi difficiles que les paysans africains, Wolof du Sénégal, Bambara du Mali, Mossi du Burkina ou Bashi du Kivu. »
Pr. Ziegler, où en êtes-vous avec la faim dans le monde et notamment en Afrique ?
« Le nombre d’affamés a augmenté, la famine est passée de 842 millions en 2005 à 854 millions en 2007. Chaque jour, 100,000 personnes meurent de faim ou de ses suites immédiates. Toutes les 5 secondes, un enfant en-dessous de 10 ans meurt de faim. Toutes les 4 minutes, quelqu’un devient aveugle par manque de vitamine A. La FAO qui est dirigée par un sénégalais remarquable, Jacques Diouf, qui est le meilleur DG que l’organisation ait jamais connu, dit que l’agriculture mondiale, dans l’état actuel de son développement, pourrait nourrir sans problèmes (2,700 calories/adulte par jour) douze (12) milliards d’êtres humains. Nous sommes actuellement 6,3 milliards d’individus, c’est-à-dire que le double de l’humanité pourrait être nourri normalement, sans recours aux OGM. Autrement dit, il n y a aucune fatalité. Non, contrairement à ce que disent les Européens : « c’est terrible la famine en Afrique ! etc… ». Non, il n y a aucune fatalité, un enfant qui meurt de faim, meurt assassiné. L’Afrique Sub-saharienne est particulièrement frappée car, entre 1972 et 2002, le chiffre de ceux qui sont gravement et en permanence sous-alimentés est passé de 79 millions à 202 millions. En Afrique, la faim est un fléau. Elle augmente d’une façon inquiétante et constitue un massacre au quotidien. »
L’agriculture ne nourrit plus son homme en Afrique. Les villages africains se vident de leur jeunesse qui fuit la misère dans des pirogues de fortune. Est-ce pour cela que vous avez développé devant le Conseil des Droits de l’Homme ce concept nouveau : « les réfugiés de la faim » ? De qui s’agit- il ?
« La politique du dumping agricole européen détruit la vie des agriculteurs africains et celle de leurs enfants. C’est ça le libéralisme ! Au même moment, l’Europe se barricade contre ceux que j’ai appelés les « Réfugiés de la faim ». Ce sont ceux, qui fuient leur pays par « nécessité ». Ce ne sont pas les réfugiés économiques qui sont les personnes qui migrent par convenance. Je défends l’état de nécessité qui est un concept bien connu du droit international et de la plupart des droits nationaux. L’état de nécessité est objectivement vérifiable. Pour survivre, l’affamé doit franchir des frontières. Il le fait illégalement. L’illégalité est supprimée par l’état de nécessité.
Aminata Traoré, l’ancienne ministre malienne que je cite dans mon livre, résume bien la situation : « les moyens humains, financiers et technologiques que l’Europe des 27 déploient contre les flux migratoires africains sont, en fait, ceux d’une guerre en bonne et due forme entre cette puissance mondiale et des jeunes Africains ruraux et urbains sans défense, dont les droits à l’éducation, à l’information économique, au travail et à l’alimentation sont bafoués dans de nombreux pays sous ajustement structurel etc. »
Dans 37 pays des 53 que compte le continent africain, l’essentiel de la richesse nationale est produit par l’agriculture. Les APE naissent sous le dictat de l’OMC qui pratique un libéralisme irresponsable. L’OMC avait donné un délai à l’Union Européenne qui allait jusqu’au 31 décembre, l’enjoignant d’instaurer la libéralisation totale. C’est une absurdité, d’autant plus que la négociation se fait dans des conditions détestables. Il est évident que les PMA, dont le Sénégal, dépendent beaucoup de la coopération au développement, du FED (le fonds européen de développement) et des programmes de coopération.
Certains disent que Louis Michel et ses collègues font du chantage : « signez les APE ou vous n’aurez plus de coopération ». Négociation ou chantage ? C’est la méthode utilisée qui est détestable. »
Mais Professeur, que dites-vous aux Africains qui se lancent dans le bioéthanol ?
« Le fait de brûler du maïs et des céréales pour les transformer en agro-carburant est un crime. C’est vrai que l’air devient irrespirable dans les pays les plus industrialisés où il y a une forte densité de voitures. Il est vrai qu’avec la destruction climatique, il faut faire quelque chose mais substituer à l’essence fossile, pétrolière, le bioéthanol constitue un crime contre l’humanité car on brûle des aliments pour faire de l’essence.
L’UE veut qu’en 2020, 10 % du carburant utilisé en Europe soit du biocarburant. Mais qui va le produire ? Qui va mourir de faim en plus ? C’est évident, les Africains ! Un seul exemple : si vous faites un plein de 50 l. avec votre voiture, il faudra brûler 352 kilos de maïs. Ce qui peut nourrir pendant une année un enfant en Zambie ou au Mexique où le maïs est nourriture de base. On est devant un carrefour. Les pays industrialisés dans un égoïsme total veulent garder leur manière de vivre avec leurs centaines de millions de voitures en passant simplement du carburant fossile au carburant agricole. « Les Africains vont nous produire ça ». Je trouve que c’est un égoïsme total. »
Pourtant des pays sous-développés, sous alimentés sont sous le charme du bioéthanol. Que faire ?
« J’ai demandé à l’Assemblée générale des Nations-Unies à New York l’application d’un moratoire de cinq (5) ans sur le biocarburant car la science progresse très vite. Je ne suis pas contre les biocarburants s’ils sont obtenus sur des déchets agricoles ; si ce n’est pas les épis de blé qu’on brûle mais les tiges. Je serai d’accord aussi longtemps que l’on pourra obtenir du bioéthanol avec des déchets. Je dirai alors Très Bien, l’important c’est qu’on ne touche pas à la nourriture. »
Propos recueillis par El Hadji Gorgui Wade NDOYE, directeur du magazine panafricain ContinentPremier.Com
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