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mardi, 08 janvier 2008

Phénoménal Obama

MANCHESTER, New Hampshire (Reuters) - La rapide ascension de Barack Obama dans la foulée de son succès lors des caucus de l'Iowa ouvre peut-être une nouvelle page dans l'histoire des relations entre Blancs et Noirs aux Etats-Unis.
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Pour les observateurs de la scène politique américaine, même si la situation peut encore se retourner rapidement, la victoire d'Obama aux caucus démocrates de l'Iowa, le 3 janvier, ébranle les idées reçues concernant les Noirs américains dans la politique américaine.

La population de l'Iowa est en grande majorité rurale et blanche, à l'image du New Hampshire, Etat du nord-est des Etats-Unis dont la population est à 94% composée de Blancs, contre une moyenne de 67% pour l'ensemble des Etats-Unis. Les derniers sondages traduisent une percée d'Obama face à Hillary Clinton, et une stagnation de tous les autres prétendants démocrates.

"Obama sort du cadre habituel et nous sommes en terrain inconnu", estime William Jelani Cobb, professeur d'histoire à l'université Spelman d'Atlanta et auteur d'un récent recueil d'essais sur la culture contemporaine des Noirs américains.

Selon lui, la victoire d'Obama dans l'Iowa est marquante dans la mesure où, historiquement, les premiers Noirs à s'être aventurés aux Etats-Unis dans des domaines traditionnellement réservés aux Blancs y sont parvenus à proposant la continuité plutôt que des réformes. Or, Obama axe sa campagne électorale sur des projets de changement.

Le fossé profond qui sépare la majorité blanche de la communauté noire, qui représente 13% de la population, défie les perceptions d'une nation qui se considère comme celle des opportunités illimitées.

Les Afro-Américains connaissent, en moyenne, une espérance de vie inférieure à celle des Blancs, malgré le développement d'une classe moyenne noire depuis le mouvement en faveur des libertés civiques des années 1960. Ils continuent, en moyenne, à gagner moins que les Blancs et la proportion d'entre eux qui est un jour arrêtée, inculpée, emprisonnée, est plus grande que chez les Blancs.

C'est dans les villes que ces disparités sont les plus importantes et elles alimentent régulièrement le débat entre les partisans des libertés civiques et ceux qui, chez les conservateurs, estiment que les Noirs doivent régler eux-mêmes leurs propres problèmes.

LE CONCEPT D'EXCEPTION FRAPPE-T-IL DE NOUVEAU ?

La séduction qu'exerce la personnalité d'Obama chez les électeurs blancs tient, pour partie, à ses racines multiculturelles, étant de mère blanche et de père kényan et ayant grandi d'abord à Hawaï puis en Indonésie, puis de nouveau à Hawaï.

Cet aspect, de même que son message optimiste, le distinguent des autres hommes politiques noirs et l'aident à ne pas apparaître comme menaçant. "Pour devenir le premier président noir, il ne semble pas envisager la chose de ce point de vue (de la couleur de peau). Il veut simplement que les gens votent pour lui parce qu'il est le bon candidat", estime un gérant de café de Scottsdale, dans l'Arizona.

A l'instar du gouverneur du Massachusetts Deval Patrick et d'autres hommes politiques noirs, il a su prendre ses distances avec des militants historiques des droits civiques comme Al Sharpton et Jesse Jackson, dont les croisades portaient, avant toute chose, sur l'égalité et la justice entre les races.

"Obama n'est pas menaçant comme Jesse Jackson et Al Sharpton. C'est quelqu'un comme nous autres", analyse un retraité blanc vivant à Portsmouth, dans le New Hampshire.

"Je ne pense même pas à lui en tant que Noir. Je le vois en tant qu'individu. Il a l'air réfléchi et dégage un grand sentiment de confiance", ajoute ce retraité, qui soutient désormais Obama, après avoir hésité entre lui et Hillary Clinton.

L'un des effets de cette forme de "neutralité raciale", c'est que les électeurs pourraient voir en Obama une exception, considère Earl Ofari Hutchinson, auteur de plusieurs livres sur les questions de races et de politique.

"Obama est à même de se faire entendre d'une large frange de l'opinion américaine. Le concept tendant à singulariser certains Noirs a toujours existé, consistant à prendre certains Afro-Américains et à leur signifier: 'Vous êtes différents. Vous êtes éloquents, intelligents".

Après le New Hampshire, la prochaine grande primaire démocrate aura lieu le 26 janvier dans un Etat du Sud, la Caroline du Sud, où Hillary Clinton a tissé des liens étroits avec l'importante communauté noire, majoritairement acquise, traditionnellement, aux démocrates.

Certains électeurs âgés de la communauté noire préfèrent soutenir Hillary Clinton, jugeant celle-ci mieux à même d'être élue et de défendre les intérêts noirs, tandis que les jeunes électeurs noirs, eux, affichent une préférence pour Obama, déclarent les analystes.

Version française Eric Faye

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