Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 18 novembre 2007

En route pour une Belgique unie

Au moins 35.000 citoyens selon la police, dont une majorité de francophones, ont marché pacifiquement ce dimanche au cœur de la capitale en faveur de l'union du pays. La pétition « Pour l'unité de la Belgique », forte de 140.000 signatures, a été remise au Sénat.
f06fb531663ae2efdd88c9740292f70d.jpg
Midi trente-cinq. En se retournant, les manifestants qui gravissent la rue Belliard, à Bruxelles, constatent le succès de leur mouvement. La vaste rue qui plonge dans les tripes du quartier européen déborde de monde. Le noir, le jaune et le rouge sont mis à toutes les sauces. On en a fait des drapeaux, des autocollants, des chapeaux, des dais, des capes, des foulards, des couvertures pour chien ; une débauche comme on en a jamais vue, même à la meilleure époque des Diables rouges. Entre 30 et 35.000 personnes défilent dans un froid sec et ensoleillé pour réclamer « l'unité de la Belgique ».

Marie-Claire Houard, l'initiatrice de ce défilé, n'en revient pas elle-même de ce succès. « Le pari est gagné ! », se réjouit-elle. En début d'après-midi, entourée de ses proches, elle remettait au Sénat les 140.000 signatures recueillies par sa pétition réclamant « que les hommes politiques respectent notre pays et son unité ». Et qu'ils s'occupent « des vrais problèmes tels que l'emploi, la sécurité, la santé, le bien-être, l'environnement… sans gaspiller leur temps et notre argent à des querelles qui ne concernent qu'une petite minorité ».

Dès le tout début de la matinée, un public très « blanc-bleu-belge » avait commencé à se réunir au pied de la gare du Nord, lieu où devait débuter la manifestation. Difficile de l'évaluer exactement, mais il semblait évident que le gros des troupes était constitué de francophones, venus clamer leur attachement au pays. Mais en tête de cortège, comme dans le long serpent coloré qui s'étira jusqu'au parc du Cinquantenaire, on entendait aussi parler flamand. Il y a aussi des « Vlamingen voor België », lance un homme bruyamment soutenu par ses amis.

Une partie des marcheurs en étaient manifestement à leur première sortie du genre, si l'on en juge par leur dégaine, à leur sage conversation et à l'œil mi-amusé mi-effrayé qu'ils lançaient à des travailleurs réclamant avec force beuglements que l'on « sauve la solidarité ». Comme ce monsieur guindé qu'interroge une caméra d'une télévision privée espagnole, tous évoquent un « signal fort », lancé à la classe politique à qui l'on rappelle les vertus de l'unité, de la diversité et de la solidarité.

Ce milieu politique, beaucoup de slogans le fustigent ; parfois avec des mots qui claquent. « Het volk werkt. Et vous, Yveke et Didier ? », interroge une banderole. « Non à la Flandre et à la Wallonie des politiciens ! », répond une autre. La cinquantaine largement entamée, une dame interroge des amis : « As-tu déjà vu des hommes politiques ? Je voudrais qu'ils lisent mon panneau. » Celui-ci qu'elle porte avec ostentation est sans équivoque. Il réclame « que les politiques s'occupent des vrais problèmes : l'emploi, l'environnement, le social ». Pour cette Bruxelloise bon chic bon genre, « il est temps qu'ils cessent de songer à servir uniquement leurs seuls intérêts et pas ceux du peuple. » Parfois, le langage est moins châtié, comme ce manifestant qui fustige les « politiciens voyous » et les « politiciens menteurs » ou cet autre qui traite Bart De Wever, le chef de file des nationalistes flamands de la N-VA, de « Milosevic ». Sans signe distinctif, plusieurs mandataires politiques avaient cependant fait le déplacement. Les présidents du PS Elio Di Rupo et du CDH, Joëlle Milquet, ainsi que

la secrétaire fédérale d'Écolo Isabelle Durant. Didier Reynders, le président du MR avait jugé inutile de s'associer « à une démarche qui se voulait uniquement citoyenne ».

Un peu partout, on s'inquiète de l'absence prolongée de gouvernement. « Cela commence sérieusement à me préoccuper, explique une dame d'origine flamande mais qui habite Beauvechain. Franchement, c'est bien le moment de venir manifester ».

« Au lieu de zieverer, il faudrait gouverner potverdomme », plaisante un groupe de manifestants, alors que plus loin s'étire une chenille de louveteaux qui scandent comme une chansonnette « La Belgique, c'est unique ». Et d'entonner une Brabançonne sous les applaudissements de la foule ravie…

La grande procession belgicaine chemine pendant de longs moments le long de la petite ceinture où elle agite ses drapeaux devant les capots des automobilistes qui klaxonnent en retour. Beaucoup de manifestants continuent à rejoindre le flot. Des jeunes qui se sont rancardés par SMS, des moins jeunes qui sortent, essoufflés des bouches de métro. Il y a des « België Best », des « Vive le Roi », des « Leve België ». On évoque la fin du parcours, la fête au parc du Cinquantenaire. « Une bonne Brabançonne, une Leffe et on s'en va ! », s'amuse une mémère.

« Courage, Sire, tout le peuple vous soutient », souligne un slogan. Ailleurs, on suggère une recette pour mettre fin aux tensions : « Yves, laisse tomber Bart, Didier, laisse tomber Olivier ».

En tête du cortège, Marie-Claire Houard remercie tout le monde et iedereen. « Ils sont là, les vrais Flamands », lance-t-elle à la foule qui boit du petit-lait. Elle est cernée de photographes et de caméras. Dans la bousculade, un journaliste lituanien lui demande de résumer le mal belge. « Les hommes politiques sont très doués pour compliquer les choses simples », synthétise-t-elle.

Les commentaires sont fermés.