lundi, 12 février 2007
Presque nostalgiques des duels Diouf-Wade !
On en serait presque nostalgique des duels Diouf-Wade ou Senghor-Wade pour ceux qui les ont connus ! Face aux récentes dérives verbales et à l’énervement, les fameuses boutades que Senghor, Diouf et Wade ont échangées passent pour mots de sympathie. L’allusion à la légendaire ruse du lièvre est entrée dans les annales politiques sénégalaises, dans une signification même gratifiante pour l’ancien opposant à Senghor et actuel locataire du palais de l’avenue du même nom.
En 2000, l’allusion à l’œuf visible a permis à Diouf de se tirer d’un mauvais pas sur une question relative à la diabolisation du candidat Wade. Après avoir détendu l’atmosphère avec son humour croustillant en wolof, le candidat-président socialiste d’alors s’est démarqué des dérives verbales avant de faire le serment de féliciter son tombeur. Quid de cet adversaire ? Eh bien, Wade a tout bonnement refusé de donner « un chèque en blanc à Diouf ».
Et pourtant, tout s’est bien passé à la fin. Malgré la prison. Malgré la contestation des résultats de 1988 qui a poussé l’opposant à servir un récurrent « Monsieur Diouf » à l’ancien président de la République.
Les exemples peuvent être multipliés dans ce duel qui a tenu les Sénégalais en haleine pour quatre élections présidentielles (83, 88, 93 et 2000). Moralité : l’humour et la dérision sont le charme de l’adversité en politique, alors que la nervosité gâche et lui ôte toute élégance.
Aujourd’hui, le paysage politique est vide d’un duel de ce type. En attendant l’éventualité d’un second tour qui créerait un face-à-face obligatoire, ils sont nombreux à s’étalonner par rapport au candidat-président, Me Abdoulaye Wade, pour deux raisons : l’héritage politique (pour la famille libérale élargie) et la succession (pour toute l’opposition et les indépendants). Cette succession, quel que soit le résultat de cette présente présidentielle, sera à l’ordre du jour, étant entendu qu’une victoire de Wade en 2007 différerait l’échéance à la présidentielle 2012.
• Wade-Niasse : Directeur de campagne d’un candidat qui livre, selon nombre d’observateurs, sa dernière grande bataille politique, Macky Sall a envie de s’affirmer. Une victoire de son candidat au premier tour le placerait sur orbite en écartant tout faiseur de roi dans un second tour. D’où sa sortie à Ziguinchor. Seulement, cette sortie a l’heur de tirer Niasse de son « isolement » après les soupçons de deal passé avec Wade. Le candidat de la Coalition « Alternative 2007 » s’est payé une tirade sur la responsabilité du chef de l’Etat sortant sur le naufrage du « Joola », avec, en prime, un : « Je ne suis pas l’égal de Macky ni celui ne Wade ». La réaction ferme de Wade génèrera chez Niasse un exercice de rhétorique : « Je ne dis pas que Wade est responsable du naufrage, mais il était au courant » de la défectuosité des moteurs. N’est-ce pas là la « faute morale » relevée ?
• Wade-Idy : Très attendu, le corps à corps oral attendu n’a pas encore eu lieu. Les attaques sont sans commune mesure avec le contenu des Cd définis comme des « bombes thermonucléaires ». En vérité, il n’y pas de choc frontal entre Idrissa Seck et son « père ».Le leader de la Coalition « And Ligueey Sénégal » s’en prend à un système plutôt qu’à un homme. Il propose « le vrai changement » Est-ce là une lapidation des actes posés par son successeur depuis avril 2004, date du départ de ce même Seck de la Primature ?
• Wade-Tanor : Il n’y a pas de duel, encore moins d’attaque personnelle. Seules quelques piques sur « l’incompétence de ce gouvernement ».
Ousmane Tanor Dieng s’adosse à l’héritage de Senghor et Diouf, deux anciens adversaires qui ont affronté Wade avec succès avant que le dernier perde le pouvoir en 2000. Les deux anciens présidents deviennent, dans cette présente campagne, des ombres tutélaires de leur successeur qui sollicite, pour la première fois, le suffrage de ses compatriotes à une présidentielle.
• Wade-Bathily : Déçu de la gestion de l’alternance, Abdoulaye Bathily s’emploie, avec hargne, à créer les conditions de départ de son ancien allié au sein de la Coalition Alternance 2000 puis du Front pour l’Alternance. A le suivre, l’alternance ne serait qu’un gros acte raté.
• Wade-Savané : Pas un duel, mais une adversité pleine d’ambiguïtés. Landing Savané ferme la parenthèse de l’alternance, mais a du mal, dans son discours, à délimiter la frontière entre revendiquer un bilan (actif et passif) et en rejeter quelques aspects (l’échec des Ics imputé, par l’ancien ministre de tutelle, au président et au Premier ministre). La notion de solidarité gouvernementale lui est opposée dans certains milieux des Libéraux, ceux-là mêmes qui rappellent le montage financier fait par les Socialistes.
• Wade et les indépendants : Le discours sur l’éthique n’est plus porté par Idrissa Seck dans sa formule de cohabitation difficile entre « le vice et la vertu ». Depuis sa déclaration de patrimoine, Me Mame Adama Guèye est identifié à ce thème de la transparence. Alioune Mbaye a sa métaphore du grand malade pour dépeindre le Sénégal. Modou Dia et Mamadou Diallo se démarquent des pratiques de la classe politique traditionnelle et omniprésente dans l’espace public. Toutefois, le Sénégal attend encore le candidat indépendant qui bousculerait les habitudes de consommation en matière d’offre électorale.
Auteur: HABIB DEMBA FALL
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