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samedi, 06 décembre 2008

La Starac sans Star

La Starac est décidément très malade. Si malade que même Britney Spears ne peut la sauver. Le prime de vendredi dernier, durant lequel Britney a fait une brève apparition, n'a réuni que 5,6 millions de téléspectateurs. C'est certes la meilleure audience de la saison, c'est aussi 700 000 téléspectateurs de plus que la semaine précédente, mais c'est insuffisant pour l'emporter sur NCIS. La série de M6 a triomphé pour la onzième fois consécutive, avec presque 7 millions de fidèles. joann4.jpg
Alors, me direz-vous, peut-être Britney n'est-elle plus ce qu'elle était. Peut-être le public s'est-il lassé de ses frasques et de ses charmes juvéniles. Pas du tout ! Le lendemain, l'aimable Brit Brit passait dans The X Factor, l'équivalent britannique de la Nouvelle Star, et elle y a fait un énorme carton : 12 millions de téléspectateurs, avec des pointes d'audience à 50 %. Il s'agit du record historique de l'émission, pourtant dans sa cinquième année d'existence.

Et pourtant figurez-vous que les Anglais - on les sait perfides - n'étaient pas satisfaits de ce triomphe fantasmagorique. Tout ça parce que Britney a refusé de recevoir les membres du jury dans sa loge. Venus présenter leurs hommages à la star, ceux-ci se sont heurtés au barrage infranchissable de ses gardes du corps. Il est quand même assez étonnant que des gens qui prétendent détecter, voir même fabriquer, des stars ne sachent pas en reconnaître une. Être star, c'est justement avoir le pouvoir de dire non. Et donc, quand vous êtes une star, si vous n'avez pas envie de saluer une petite créature de télé-réalité, toute boursouflée de suffisance, vous ne le faites pas, tout simplement. Ces juges impertinents devraient être reconnaissants à Britney de ne pas les avoir fait bastonner pour avoir osé troubler la sérénité de son boudoir en tentant de forcer sa porte.

Pour en revenir à la Starac après cette petite digression, les résultats décevants du prime ne viennent naturellement pas des 6 brèves minutes durant lesquelles Britney était sur le plateau de Nikos mais plutôt du reste de l'émission : les 160 longues minutes où elle n'y était pas !

Et aujourd'hui, Britney n'est pas là, pas là du tout. Cette première demi-finale, entre Joanna et Mickels, est donc marquée par un profond ennui. À 21 heures à peine, alors que, paraît-il, "la compétition atteint son point culminant", je baille déjà.

Marine Méchin, la coach émotionnelle de la promotion, qui se fait copieusement huer par le public à chacune de ses interventions, annonce d'emblée la couleur : "Vous aurez l'occasion de faire 'Ouh' pendant la soirée, je vous le promets !" Elle ne croit pas si bien dire. Il y a en effet de quoi huer, mais surtout de quoi hurler !

Il est déjà fort pénible de voir toujours les même artistes, parmi lesquels l'inévitable Florent Pagny, pourtant déjà venu en octobre, et d'entendre toujours les mêmes chansons, dont les sempiternels "Requiem pour un fou", "Vesoul" ou "L'Hymne à l'amour". Mais, pour que le pénible devienne intolérable, la production de l'émission transforme ces figures imposées déjà assommantes en de ridicules épreuves scolaires. Les professeurs ne notent plus les élèves : ils tranchent en faveur de l'un ou l'autre des demi-finalistes à l'occasion de cinq "défis" : chanter avec un artiste, performance vocale, tableau de Kamel, interprétation et émotion.

Par exemple, pour le défi Performance vocale, les deux adversaires doivent interpréter "Requiem pour un fou" de Johnny Hallyday durant 1mn30 chacun. Pour que le ridicule soit complet, ils sont juchés sur des plate-formes qui s'élèvent quand c'est leur tour de chanter. En tout cas, ça crie bien fort, ce qui est sans doute le but recherché. Joanna chante comme une sirène (d'alarme) et Mickels manque se casser la voix. Pour le défi Interprétation, les infortunés sont debouts sur des petites estrades devant un rideau rouge, comme des écoliers récitant un compliment à la distribution des prix. Ils interprètent beaucoup, beaucoup, c'est-à-dire qu'ils font beaucoup de gestes : comme chacun sait, l'interprétation, ça ne sert à rien si ça ne se voit pas de loin. Je suis persuadé que Jacques Brel serait ravi de savoir que "Vesoul" est désormais devenu l'étalon pour mesurer la capacité à chanter vite en agitant les bras.

Le plus spectaculaire des défis, c'est bien sûr le tableau de Kamel Ouali, le plus grand chorégraphe de France. Joanna interprète "What You're Waiting For" de Gwen Stefani sur une passerelle métallique, qu'elle partage avec des danseurs à têtes de cheval. À la fin du numéro, Nikos pose la question qui tue à Kamel : "Pourquoi des têtes de chevaux ?" Et l'illustre chorégraphe de répondre : "Parce qu'elle rêve, elle rêve beaucoup, elle rêve de s'évader." Merci, Kamel : c'est beaucoup plus clair maintenant. Mickels, quant à lui, chante "Un autre monde" de Téléphone enfermé dans une grande sphère transparente avec toute une troupe de danseurs qui s'agite (mais pas trop pour ne pas faire tomber tout le monde).

Vous remarquerez que je ne vous indique pas qui, de l'avis des professeurs, a remporté chacun de ces défis : c'est tout simplement parce que je m'en moque dans des proportions qui vous donneraient une idée de l'infini.

Naturellement, Joanna et Mickels ne sont pas les seuls à donner de leur personne pour vous distraire. Il y aussi Gautier, qui fait ce qu'il fait de mieux - l'idiot - lors d'un duo avec Salvatore Adamo, qu'on a sorti de son sarcophage pour l'occasion. Il y aussi Alice, qui sourit et qui sourit. Elle sourit avec James Blunt, dont les titres prêtent à la rigolade, c'est bien connu. Elle sourit aussi avec Amy McDonald, dont la dernière chanson, éminemment comique, traite de la jeunesse britannique désabusée qui s'enivre pour oublier la vacuité de son existence. C'est vraiment à se tordre. James Blunt n'est d'ailleurs pas avare de compliments pour Alice : "Elle a un beau sourire".

Il n'y a pas que les demi-finalistes qui poussent la chansonnette ce soir. Pour un de ces moments d'émotion dont la Starac a le secret, on a fait revenir Quentin (rappelez-vous, c'était le jeune qui chantait comme un vieux). Il est venu faire à Joanna une déclaration d'amour en musique (entre eux, c'est du sérieux). La veille, il a composé une petite ode à sa dulcinée : "L'écran s'est fermééé, tes larmes ont coulééé, viens dans mes braaaas, je pense à toiiii". C'est tellement joli que j'ai fini par couper le son. Joanna est si bouleversée qu'elle embrasse Quentin, à moins que ce ne soit simplement pour le faire taire.

Évidemment, Mickels aussi a droit à son moment d'émotion. Sa mamie est au téléphone : elle n'a pas pu venir. Ohhh, quelle déception ! Mais si, elle a pu venir : elle arrive justement derrière lui. Aaah, quel soulagement ! Mamie est très fière de Mickels ; elle est aussi très fière de Nikos. Et elle se met à chanter en italien sur un plateau soudain silencieux. Nikos en est tout ému : "Madame, venez que je vous embrasse et que je vous serre dans mes bras. Vous savez que c'est important pour nous, les mamies." Je pense bien que c'est important : il n'y à voir l'audience du JT depuis que TF1 a voulu rajeunir son audience en chassant PPDA. Les mamies ont découvert "Plus belle la vie" et ont réalisé qu'elles préféraient savoir ce qui arrive dans le quartier du Mistral plutôt qu'en Irak ou en Afghanistan.

Puisqu'on parle de personnes âgées, voilà qu'à 23h11, Johnny Hallyday arrive sur le plateau pour interpréter un nouvel extrait de son dernier albumm "Ça ne finira jamais". Certes, le timing est parfait parce qu'à cette heure-là, c'est ce que tout le monde pense : ça n'en finira jamais ! On peut cependant se demander pourquoi la production de l'émission nous impose cet ultime numéro, comme une cerise pourrie sur un gateau déjà bien moisi. La prestation n'est évidemment pas en direct (Nikos fait d'ailleurs peu d'effort pour nous convaincre du contraire) : il s'agit d'une des séquences enregistrées le 16 octobre dernier et qui sont égrénées depuis au fil des primes. Ce n'est même plus un subterfuge sournois, juste une mauvaise plaisanterie.

Les plus mauvais spectacles ayant aussi une fin, voici que s'avance l'huissier avec l'enveloppe fatidique contenant les résultats du vote. Et là - surprise ébouriffante ! - Mickels l'emporte sur Joanna avec 53 % des suffrages. La meilleure élève de la promotion, première au classement des élèves quasiment sans interruption, est donc éliminée avant la finale. Ce n'est pas complètement une surprise cependant. Joanna fait suite à beaucoup d'autres bonnes élèves (Sofia de la Starac 3, Hoda de la Starac 4, Émilie de la Starac 5, Cynthia de la Starac 6), qui ont fait figure de favorites avant de trébucher en demi-finale. Le public n'aime pas les premières de la classe.

Est-ce une injustice. Peut-être, peut-être pas, mais surtout : on s'en fout ! La seconde demi-finale opposera la semaine prochaine Alice à Gautier. Un grand moment de musique en perspective. Comme le dit Nikos en conclusion, "nous arrivons presque au bout du marathon". Ouf !

Kevin Moulback