A la guerre comme à la guerre. Au jeu du Stratego, c’est l’éclaireur Magnette qui s’est coltiné, ce dimanche, la dure besogne du Parti socialiste : mettre les troupes nationalistes flamandes sous pression maximale avant la réunion cruciale de ce lundi après-midi entre Bart De Wever et Elio Di Rupo.
Rappel : lors de cette réunion placée sous l’égide du duo Flahaut/Pieters, les deux présidents de parti devront indiquer si des négociations à sept (PS, N-VA, CD&V, SP.A, Groen !, Ecolo et CDH) peuvent être relancées - 100 jours, ou presque, après le scrutin du 13 juin. Paul Magnette est ainsi descendu sur le plateau de la chaîne publique flamande, au "Zevende Dag", pour dérouler son message : à la N-VA de montrer qu’elle peut, qu’elle veut faire un accord. "Bart De Wever n’a encore rien montré, à part qu’il peut aller déjeuner dans des restaurants très chics", a pointé l’éclaireur socialiste. Et de pousser le curseur : "la N-VA a plusieurs fois renié ses engagements et sa parole". Rien n’avait été laissé au hasard; la sortie de Magnette avait reçu le blanc-seing du président Di Rupo, et elle s’est prolongée sur le plateau de la RTBF quelques minutes plus tard.
En filigrane, il est clair que le PS balaye d’un revers de la main les conditions que les nationalistes flamands posent pour une reprise des pourparlers. Primo, le Parti socialiste n’acceptera pas de définir ce lundi la marge de l’autonomie fiscale qui sera - peut-être - laissée aux entités fédérées au bout de la négociation. "Faut quand même pas nous prendre pour des cinglés !, se fâche-t-on même au PS. On ne va pas aller offrir un symbole à De Wever avant d’avoir commencé à discuter". Secundo, Elio Di Rupo l’a répété samedi à Namur, les négociations se dérouleront à 7 et non à 2, comme le souhaite la N-VA. Tertio, fait valoir le Parti socialiste, 6 partis sur 7 ont marqué leur accord avec la méthodologie proposée (6 à 8 semaines de négociation, budget et loi de financement négociés en parallèle, ) puisque le CD&V a marqué son accord sur cette marche à suivre.
Côté nationaliste flamand, dimanche, on a vécu le raid de l’éclaireur Magnette comme un uppercut. Mais on s’est bien gardé de réagir officiellement : "On prend acte des insultes et du fait que l’on nous traite tous les jours de menteurs pour nous mettre sous pression, indique-t-on à la N-VA. Si on pense que c’est de cette manière qu’on va relancer des négociations, c’est de la débilité".
C’est une guerre de tranchées, donc, dans laquelle s’enferrent les deux partis mammouths. Alors, où est la porte de sortie (EXIT) ?
Personne ne veut endosser la responsabilité de l’échec, personne ne veut prendre la responsabilité de débrancher la prise de cette négociation moribonde. Et abréger cette agonie politique. Eric Defoort, un proche de Bart De Wever, a pronostiqué dimanche que la négociation ne reprendrait pas. Mais, au vrai, aucune décision n’a encore été arrêtée par la N-VA. Stop ou encore ? Une réunion capitale des hauts gradés du parti doit avoir lieu ce lundi matin, quelques heures avant que la rencontre De Wever/Di Rupo ait lieu. Le suspense devrait, donc, demeurer entier jusqu’à la dernière minute. Dans la foulée de cette rencontre au sommet, les deux médiateurs royaux, André Flahaut et Danny Pieters, en selle depuis 16 jours, devraient remettre leur rapport définitif au souverain.
Si les deux protagonistes principaux de cette mauvaise pièce politique, Di Rupo et De Wever, n’ont qu’une envie, ne plus jamais se revoir, l’absence d’alternative pourrait les pousser à prolonger cette aventure. C’est que "celui qui dit "stop" en premier, il est mort : il risque de perdre les éventuelles élections", place un observateur de premier plan. Une drôle de guerre. Qui n’amuse plus grand-monde.