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mardi, 18 mars 2008

Hommage à Katoucha

Le plus bel hommage que l’on puisse rendre à Katoucha, enlevée de manière brutale au parfum de notre amour, c’est d’être vigilant.
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Son souvenir s’impose à moi. C’était hier, ce soir-là. Assise en face de moi, la voix grave, son cil de chat m’enveloppant toute entière, elle me disait son mal-vivre.Des démons qui la rongeaient. Au fond de ses pupilles limpides, un océan de tristesse, dont on pouvait penser qu’elle ne sortirait indemne. Un battement de cils plus tard, le rideau de tristesse s’effaçait et dans un fonds de gaieté dont elle seule avait le secret, elle partait d’un grand rire et s’excusait presque de m’indisposer avec ses souffrances.

C’était hier, ce soir-là. C’est presque loin déjà. Elle me confiait ses projets de films, son livre contre l’excision, de la ligne de vêtements inspirée de l’artisanat africain qu’elle lançait. Les tâches étaient lourdes et pressantes.Les priorités l’oppressaient. Le temps l’angoissait. Ce temps qui lui manquera tant... comme si elle avait déjà pris rendez-vous avec son destin.

Du temps, il lui en fallait pour tout recommencer avec ses enfants. Du temps, en prendre pour vivre sereinement sans céder au diable qui la berçait de ses consolations éphémères. Un peu de temps encore pour aimer, donner et recevoir, loin des tourbillons de la ville et de la vie.

C’était hier cette nuit-là, dans ce Paris où par un temps de chien, elle était revenue recoller les débris d’une vie qui ne cessait de lui échapper, que tout se brisa brutalement. Certainement dans une souffrance inouïe.

Katoucha, c’était la modestie et la simplicité. C’était une femme belle et libre, qui ne connaissait ni les grandes ou petites vanités, victime souriante des bassesses dont elle pouvait faire l’objet.Tout ce qui se mesure finit... bien évidemment.

Katoucha nous a laissés une tâche cependant. Nous, qui l’avons connue et aimée, avons la responsabilité de poursuivre le combat qu’elle a amorcé contre l’excision. Meurtrie dans sa chair. Dénoncer certains aspects de la tradition tout en préservant l’amour de ses proches a fendu son cœur d’enfant aimante.

Consolons-nous de l’avoir connue et chérie et soyons vigilants pour qu’au seuil de cette tragique disparition, nous menions des combats préventifs pour que d’autres petites princesses aux yeux de chat et à l’innocence juvénile ne soient plus aux mains de certaines traditions irresponsables mais à la peau dure. Il est difficile de supprimer notre souffrance ou d’en guérir.

Est-ce du ressort des vaines créatures que nous sommes de refuser la volonté de Dieu ? Ce serait un combat vain. Alors mettons nous à perpétuer sa mémoire de manière féconde en luttant fermement contre les traditions porteuses de souffrances inutiles. Repose en paix, chère Katouch. Ta mort ne sera pas vaine.
Oumou Wane, amie de Katoucha

13:10 Publié dans Art | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : artiste, beauté |  del.icio.us |  Facebook | | |