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mardi, 25 décembre 2007

Au procès, des parents accusent L'Arche de Zoé d'avoir "volé" leurs enfants

f9e11e94441c51881c516cb710e02e73.jpgN'DJAMENA (AFP) - Les parents des 103 enfants que L'Arche de Zoé voulait emmener du Tchad vers la France ont accusé lundi, devant la Cour criminelle de N'Djamena, les membres français de l'association jugés pour "tentative d'enlèvement" d'avoir "volé" leurs petits.

Les avocats des 70 familles parties civiles ont demandé qu'ils soient condamnés, en réparation de "préjudices incommensurables", à payer 650 millions de francs CFA (un million d'euros) pour chacun des 103 enfants, qui n'ont toujours pas été remis à leurs parents.

L'Etat tchadien a réclamé 4 milliards de francs CFA et la retenue comme "garantie" du Boeing 757 de la compagnie espagnole Girjet qui devait transporter les enfants en France le 25 octobre.

A l'ouverture de l'audience, les six Français, jugés avec trois Tchadiens et un Soudanais accusés de "complicité", avaient l'air moins détendus que samedi. L'infirmière Nadia Merimi, victime d'un léger malaise, a été évacuée à la mi-journée vers la base militaire française de N'Djamena.

Seulement effleurée jusqu'ici, la question de l'exfiltration avortée des enfants, à l'insu des personnes qui les ont confiés à L'Arche de Zoé, s'est invitée dans les débats.

"Les Blancs ont volé les enfants pour les emmener en France", lance un père qui a confié l'un de ses fils à deux intermédiaires à Tiné, ville frontalière du Soudan. "On nous disait qu'ils allaient les mettre à l'école à Abéché" (est).

Un père, vêtu d'une djellabah et d'une toque blanches, raconte avoir confié ses enfants au marabout soudanais Souleïmane Ibrahim Adam, jugé pour "complicité d'enlèvement" et accusé par le président de L'Arche de Zoé Eric Breteau d'avoir menti en présentant les enfants comme des orphelins du Darfour, région soudanaise voisine en guerre civile.

"Souleïmane a emmené les enfants dans une charrette vers Adré (autre ville frontalière) pour les scolariser. Mais quand nous sommes allés les voir à Adré, ils étaient déjà partis à Abéché", témoigne-t-il.

"C'est du vol d'enfants", tonne un avocat des parties civiles.

La défense tente alors d'esquiver le sujet et de revenir sur son thème de prédilection, la nationalité et la filiation des enfants, dont les Français sont accusés d'avoir "compromis l'état civil".

Avec insistance, Me Gilbert Collard a demandé à un père s'il dispose des actes de naissance de ses enfants. "Non", répond-il.

"Comment peut-on compromettre un état civil quand il n'y en a pas", s'exclame alors l'avocat français, immédiatement recadré par les magistrats de la Cour qui s'emploient à lui expliquer que, dans les "régions reculées" dont sont originaires ces familles, l'acte de naissance est un document très rare.

"Je suis surpris que la défense devienne aussi légaliste alors que les enfants allaient être emmenés en France sans aucune autorisation", rétorque le procureur général Beassoum Ben Ngassoro.

A l'heure des plaidoiries, les parties civiles s'en sont prises à Eric Breteau, "manipulateur hors normes", "vendeur de têtes", "qui a roulé tout le monde dans la farine". Le meneur de L'Arche de Zoé, qui le matin intervenait à tout moment pour distribuer bons et mauvais points, secoue la tête dans le box.

"Il y a des gens qui pensent que les enfants sont une marchandise", estime Me Josiane Laminal Ndintamadji. "On n'a pas entendu de la part des protagonistes ne serait-ce qu'un début de regret", renchérit Me Amadi Naté.

Pour l'avocat de l'Etat tchadien, Philippe Houssiné, l'invocation de la Convention de Genève sur le droit d'asile "ne couvre pas l'illégalité des actes d'Eric Breteau et de sa clique".

Le verdict pourrait tomber mercredi soir, après les réquisitions du parquet et les plaidoiries de la défense.
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