jeudi, 19 août 2010
Expulsion des Roms : la Roumanie et la Bulgarie haussent le ton
Les critiques se multiplient en Roumanie et en Bulgarie contre la politique française à l'égard des Roms, alors que la France compte expulser 700 Roms de son territoire d'ici à la fin août. Le ministre roumain des affaires étrangères, Teodor Baconschi, s'est dit mercredi 18 août inquiet des "risques de dérapage populiste" et de "réactions xénophobes", et espère que la légalité sera respectée pour chacune des "expulsions" effectuées par la France, faisant écho à des craintes exprimées lundi par des ONG roumaines de défense des Roms.Le chef de la diplomatie a surtout insisté sur la nécessité d'une coopération réelle entre Paris, Bucarest et l'Union européenne, "sans fièvre électoraliste artificielle" pour résoudre les problèmes de pauvreté, d'accès aux soins et d'éducation auxquels font face les Roms dans toute l'Europe. La communauté compte entre 530 000 et 2,5 millions de membres en Roumanie et environ 800 000 en Bulgarie. De son côté, la Commission européenne a rappelé que la France "doit respecter les règles" sur la liberté de circulation et d'établissement des citoyens européens. Bruxelles suit "très attentivement" la situation alors que Paris s'apprête à reconduire en Roumanie 79 Roms jeudi.
UNE POLITIQUE DE "DÉPORTATION"
Le secrétaire d'Etat roumain chargé de la réinsertion des Roms a annoncé mercredi que 371 Roms roumains seraient rapatriés d'ici au 26 août depuis la France. "Tous ces retours sont basés exclusivement sur la procédure de retour volontaire", a-t-il déclaré. 79 personnes devraient arriver à Bucarest jeudi, tandis que 132 autres sont attendues dans le pays vendredi. Les personnes restantes rentreront en Roumanie le 26 août.
Interrogé sur le retour en France de Roms reconduits, le ministre roumain des affaires étrangères a rappelé que la Roumanie "ne peut pas bloquer à la frontière" ses citoyens, membres de l'UE, s'ils "n'ont pas commis une infraction prouvée en justice par un verdict définitif".
Des critiques qui rejoignent celles exprimées en Bulgarie. Le président de la section bulgare du comité Helsinki, une ONG de défense des droits de l'homme, s'est ainsi déclaré "inquiet de ce que la mesure (adoptée par la France) vise un groupe ethnique". Le journal bulgare d'opposition Sega a pour sa part dénoncé mardi la politique de "déportation" des Roms, estimant que Sofia et Bucarest n'ont aucun moyen de les empêcher de circuler en Europe sauf "par un retour du communisme avec l'exigence de visas de sortie".
Ilona Tomova, chercheuse spécialisée sur les Roms à l'Académie bulgare des sciences, a pour sa part indiqué être "attristée que la France, pays symbole de la démocratie (...) contribue à la stigmatisation" des Roms.
"APPROCHE LIMITÉE"
Le ministre roumain des affaires étrangères a également réagi contre les critiques et les menaces de la France sur la gestion de la communauté rom en Roumanie et en Bulgarie. Le secrétaire d'Etat français aux affaires européennes, Pierre Lellouche, avait même évoqué un possible report de l'intégration des deux pays au sein de l'espace Schengen, prévue en 2011.
"Si nous échangeons des accusations, ou criminalisons à titre collectif des groupes ethniques, nous ressuscitons des souvenirs parmi les moins plaisants. Et au lieu de trouver des solutions nous générons des tensions", a réagi le ministre roumain, en égratignant au passage Pierre Lellouche et son approche "généralement limitée à sa circonscription dans le 8e arrondissement de Paris".
Teodor Baconschi a néanmoins renouvelé sa confiance pour "aborder avec le calme nécessaire ce problème commun sans en faire une occasion de porter ombrage aux excellentes relations franco-roumaines". Deux secrétaires d'Etat roumains se rendront à Paris le 30 août pour aborder la question des Roms. Le ministre français de l'immigration, Eric Besson, et Pierre Lellouche sont attendus à Bucarest en septembre.
10:34 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rom | del.icio.us | Facebook | | |
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