jeudi, 20 mars 2008
Yves Leterme, nommé Premier ministre en Belgique
BRUXELLES (Reuters) - Le roi Albert II de Belgique a accepté jeudi la démission du Premier ministre sortant Guy Verhofstadt et a nommé à sa place le démocrate-chrétien flamand Yves Leterme, neuf mois après les élections du 10 juin dernier.
Leterme doit se présenter dans l'après-midi devant le parlement belge pour y lire sa déclaration de politique générale afin d'obtenir samedi un vote de confiance, mettant temporairement fin à une crise qui a fait vaciller le pays.
Les congrès des cinq partis qui forment la coalition - les libéraux et les démocrates-chrétiens du nord et du sud du pays auxquels se sont alliés les socialistes francophones - ont approuvé mercredi le programme de gouvernement.
Ils ont également procédé aux choix des 15 ministres qui feront partie d'un cabinet sans grande nouveauté.
Si Leterme met fin au long règne de Verhofstadt, qui avait pris le pouvoir en 1999, le libéral francophone Didier Reynders garde le portefeuille des Finances, tandis que les libéraux flamands Karel de Gucht et Patrick Dewael restent respectivement aux Affaires étrangères et à l'Intérieur.
La seule surprise aura été la décision de la démocrate-chrétienne francophone Joëlle Milquet, surnommée "Madame non" par les Flamands en raison de son refus pendant des mois d'accepter leurs revendications de réforme de l'Etat par crainte de voir disparaître la Belgique, de siéger au poste de vice-Premier ministre chargé de l'Emploi.
Après s'être déchirés comme jamais auparavant pendant plus de neuf mois, Flamands et francophones sont parvenus à un "compromis à la belge" qui reste néanmoins fragile.
ACCORD MINIMALISTE
Cet accord doit beaucoup à Guy Verhofstadt, qui a accepté en décembre d'assumer la direction d'un gouvernement intérimaire d'une durée de vie de trois mois pour relancer Leterme, qui avait échoué par deux fois à former un gouvernement définitif.
Il est parvenu à recréer un climat de confiance minimale entre les deux communautés du pays pour conclure un programme classique - mais encore vague - centré sur la réforme fiscale, la création de 200.000 emplois et l'immigration.
Des deux côtés de la "frontière linguistique" qui sépare les six millions de Flamands et les quatre millions de francophones, on a pris conscience que des concessions étaient nécessaires.
Les Flamands, qui réclament une réforme de l'Etat selon laquelle d'énormes pans de compétences seraient gérées par les régions, y compris dans le domaine de la sécurité sociale, ont mis de l'eau dans leur vin et accepté d'étaler leur programme.
Les francophones, qui ont commencé par rejeter toutes les revendications flamandes, dont ils craignaient qu'elles ne sonnent le glas de l'Etat fédéral, ont petit à petit compris qu'il leur fallait négocier sous peine de voir la Flandre s'émanciper voire, pour les pessimistes, faire sécession.
L'accord de gouvernement prévoit donc des transferts de compétences anecdotiques, comme la sécurité routière.
Mais le nouveau gouvernement devra d'abord concrétiser les points économiques de l'accord et la présence de toutes les sensibilités politiques, des socialistes francophones aux libéraux, promet de rudes batailles idéologiques.
Enfin, si les Flamands ont accepté de patienter avant d'obtenir satisfaction sur leurs revendications communautaires, ils n'y ont pas le moins du monde renoncé à moyen terme.
LE TEST DE JUILLET
Le premier test interviendra dès juillet prochain, lorsque le gouvernement se penchera sur de nouveaux transferts de compétences qui devraient porter dans un premier temps sur l'emploi, dont la structure est très différente en Flandre, où les bras manquent, et la Wallonie, où le chômage frôle les 20%.
Il faudra en outre parvenir à un compromis sur le sort à réserver aux 150.000 francophones qui vivent dans la périphérie flamande de Bruxelles et que les partis du Nord ne veulent plus voir voter pour des listes francophones.
L'immense majorité des éditorialistes, tant en Flandre qu'en Wallonie, se montrent sceptiques sur les chances de voir le gouvernement achever la législature, dont il reste trois ans.
"Le règne d'Yves Leterme commence sous un ciel d'orage", commente ainsi le quotidien Le Soir.
L'une des grandes inconnues est l'attitude des nationalistes flamands de la NV-A, un parti qui prône l'indépendance à terme de la Flandre, qui se sont présentés en cartel aux élections avec les démocrates-chrétiens pour revenir au pouvoir.
S'ils ont décidé de ne pas participer au gouvernement, jugeant la réforme de l'Etat insuffisante, ils ont accepté de voter la confiance à l'exception de son président, Bart De Wever, pour lequel la Belgique "n'existe plus".
La NV-A pourrait renoncer à soutenir la coalition en juillet si elle juge les réformes insuffisantes, privant ainsi le gouvernement de la majorité requise des deux-tiers.
Les partis de la coalition devraient alors faire appel aux écologistes pour faire l'appoint, ce qui n'est pas gagné.
La plupart des analystes estiment que le gouvernement "Leterme Ier" éclatera en 2009 et que l'on regroupera alors les élections législatives et régionales, ce qui risque de radicaliser les positions dans les deux communautés.
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